Mwami Antoine Munongo Luhinda Shalo
Le Mwami Luhinda Shalo naquit en 1905, sous le règne menacé de Mukanda-Bantu (voir biographie de Mukanda-Bantu). Il hérita des enseignements de l’histoire des Bayeke ; de ceux qui faisaient partie de la première génération des Bayeke au Katanga. Leurs mémoires étaient encore empreintes des souvenirs du Tanganyika et des récents déroulements de l’histoire qui s’écrivait devant leurs yeux. Il ne faut pas oublier que Msiri fut assassiné en 1891, à peine 14 ans avant la naissance du futur Luhinda. C’est avec ce fond de toile que la vie d’Antoine Munongo se dessina. Nous parlons ici d’une vie riche en culture Yeke et aussi occidentale, car Antoine Munongo était la quintessence de ce metissage culturel auquel les africains de sa génération furent confrontés. La vie d’Antoine Munongo fut guidée par des principes Yeke, et forgée par des pères qui étaient conscients des défis que la dynastie de Msiri devait relever. Le Mwami Luhinda porta notre étendard haut et il nous a légué des oeuvres inestimables.
Le père d’Antoine Munongo était le Mwami Mwenda Munongo Musanfya Ntanga, et sa mère était la Mugoli Moroyi. Peu de temps après la naissance d’Antoine Munongo, son père devint le représentant du Bwami à Kibanda dans le Buluba, région d’origine de la mère de Musanfya, la Mugoli Kabondo Ngoie (voir biographie de Musanfya). C’est pour cette raison que le jeune Antoine Munongo fut, pour un court temps, élevé par son père (on dirait en occident « oncle ») le Mwami Kitanika Mabumba, qui succéda à Mukanda-Bantu en 1910.
Kitanika prônait la scolarisation de ses enfants/neveux, afin qu’ils fussent capables de faire face aux européens, qui avaient peu d’estime pour la tradition orale, et la culture africaine. Pour eux, l’écriture et l’esprit cartésien étaient l’aune avec laquelle on mesurait une culture. Et le futur Luhinda acquit ses connaissances en s’appliquant avec virtuosité. Quand il atteint l’âge d’aller aux humanités, Antoine Munongo opta pour les études gréco-latines au séminaire. Les études universitaires étaient découragées aux congolais, et Antoine Munongo, comme moult de congolais ne put accéder aux études de son choix. Mais ses qualités intellectuelles furent si impressionnantes qu’il reçut une bourse de stage de formation à Bruxelles en gestion et économie ; chose si rare surtout en ce temps là. Après ses études, Antoine Munongo travailla comme interprète au parquet d’Elisabethville (Lubumbashi actuel), et occupa d’autres fonctions administratives dans cette même ville.
En 1956, après une longue année tourmentée par de fausses accusations, et des conditions quasi carcérale à Jadotville (Likasi actuel), le Mwami Musanfya Ntanga s’éteint. C’est ainsi que le 12 Septembre 1956, après avoir été choisi comme successeur, Antoine Munongo fut intronisé comme Mwenda Luhinda Shalo (le protecteur/gardien de la terre ou Royaume). Comme son nom l’indique, le Mwami Luhinda Shalo devint au sens propre le gardien et le protecteur de notre histoire et culture. Il s’attela à cette tâche rigoureuse de traduire les écrits de Mukanda-Bantu et ceux de Kitanika. Il répertoria tous les chants Yeke, qui jusque là étaient en voie de disparition, et il les écrit avec l’assistance de son ami kiwele en notes de musique.
L’écriture de l’histoire et des chants Yeke fut un point culminant, car elle insuffla une nouvelle vie dans une histoire menacée par la faillibilité humaine. Les contributions du Mwami Luhinda sont nombreuses. En 1957, il fut l’un des délégués congolais représentant les Rois du Congo et du Katanga à la table Ronde en Belgique. Il y laissa une marque indélébile. Dans les années 60, pendant les années tumultueuses qui succédèrent l’indépendance, il était la force sage qui réussit à calmer les âmes effrayées de notre peuple. Pendant cette période précaire, il décida de faire de Bunkeya sa résidence officielle, lui redonnant sa gloire d’antan. C’est ainsi que nombre de gens, y compris son jeune frère Godefroid Munongo, faisaient le voyage jusqu’à Bunkeya afin de demander le conseil du Mwami sur quelque sujet que ce soit. Pendant ces années passées à Bunkeya, le Mwami modernisa notre système légal traditionnel. Il supervisa les grandes constructions et rénovations, mis l’accent sur l’éducation des jeunes, garçons ou filles, et mena notre peuple des années coloniales à l’indépendance.
En 1976, vingt ans après son intronisation, le Mwami Mwenda Luhinda Shalo Antoine Munongo mourut à Bunkeya, entouré de sa famille et du peuple Yeke. Jusqu’à ce jour, nous utilisons les mêmes manuels d’histoires et de musique Yeke qu’il nous a légués. Ses contributions restent sans valeur.
Le Mwami Luhinda se maria à deux reprises, et eut plusieurs enfants, dont nous citons les noms des successeurs potentiels, c’est à dire les hommes, puisque le système successoral du royaume des Bayeke est patrilinéaire :
Mwenda Munongo Bernard (décédé)
Kalasa Msiri Etienne (décédé)
Kitanika Marcel (décédé)
Masuka Joseph (décédé)
Kabobo Grégoire (décédé)
Mushinkula Michel (décédé)
Likuku Godefroid
Bunana Augustin