Vers le milieu du dix-neuvième siècle, celui que le monde entier allait connaître sous le nom de Mushidi ou M’siri « la terre toute la terre », de son vrai nom Ngelengwa Mukala, accompagna son père Kalasa au Katanga où celui-ci était déjà venu pour acquérir des biens, dont le cuivre. Kalasa avait tissé des liens d’amitié avec des chefs autochtones dont Mpande des Basanga, Katanga des Balamba, Sompwe des Bena-Mitumba, Kiniama Katala et d’autres.
Kalasa était de la tribu des Sumbwa de l’Unyamwezi, partie de l’actuelle Tanzanie.
Après quelques années passées au Busumbwa, M’siri sollicita et obtint de son père Kalasa Mazwiri l’autorisation de retourner au Katanga. M’siri revint chez le Chef Katanga qui le reçut à bras ouverts et lui indiqua un endroit où s’installer. M’siri y construisit son premier village qu’il appela Lutipuka. M’siri commença à acquérir des biens et de l’ascendance au Katanga. Il mit son intelligence, ses bras, ses armes à feu et tout son dévouement au service de son ‘père’ Katanga, et plus tard d’autres rois autochtones.
C’est ainsi qu’il combattit pour eux, à leur demande, pour remettre de l’ordre dans les différents royaumes, mater des vassaux en révolte, et repousser les Baluba dont les razzias dans ces contrées étaient comme une épidémie contre laquelle les autochtones étaient sans défense. M’siri débarrassa ces rois de l’emprise des Lundas de Kazembe à qui ils payaient tribut, et dont M’siri écrasa l’armée commandée par Lubabila et Saka Diata, deux fils du chef Lunda, tuant le premier de ses mains.
En reconnaissance des services rendus, Mpande lui fit don d’un territoire et tous les autres rois lui demandèrent de continuer à être leur bouclier contre les Luba et les Lunda. Il commencèrent aussi à lui payer tribut. Ce sont les autochtones eux-mêmes qui ont fait de M’siri le maître de ce pays qu’il baptisa Garaganza du nom d’un royaume de chez lui et que les premiers missionnaires protestants déformèrent en Garenganze pour baptiser la mission qu’ils venaient de construire à Bunkeya.
M’siri laissa les différents chefs diriger eux-mêmes leurs contrées respectives se contentant de leur adjoindre des représentants qui devaient veiller au respect de l’ordre et de la loi, faire payer le tribut et recruter des guerriers.
Tout en organisant son empire, il continua à faire du commerce. Ses Bayeke se perfectionnèrent dans la fonte du cuivre et introduisirent le fil de cuivre à la place des lingots poussant ainsi vers le produit semi-fini. M’siri continua à vendre du cuivre, de l’ivoire, du sel, à ses partenaires de l’océan Indien en échange de fusils, poudre, tissus, et perles. Plus tard, il ouvrira une autre route commerciale vers l’ouest jusqu’à l’océan Atlantique à Luanda et Lobito, réalisant ainsi le premier, une liaison commerciale transcontinentale ‘de Angola a contra Costa ‘.
Sa population s’accroissant, M’siri déménagea plusieurs fois, partant de Lutipuka son premier village, en passant par Kisungu, Kikuni, Kisanga, Mulungwishi, Kyama, Kalabi, Kishimunda, Lwambo où il fut intronisé en même temps que son oncle maternel Mutaka et Kukulu avant de finir à Bunkeya, sa dernière capitale que le missionnaire anglais Arnot qualifia de ‘Londres africaine’.
C’est à Bunkeya qu’à partir de 1884, que les missionnaires et les explorateurs allemands, anglais et belges le trouvèrent. Il y eut successivement, Reichard, Arnot, Swan et Faulkner, Thompson, Crawford et Lane, Sharpe, Le Marinel, Legat et Delcommune et enfin Stairs dont l’adjoint un belge, le Capitaine Bodson, assassina M’siri avant d’être lui-même abattu par Masuka, fils de M’siri. Ce dernier trouva la mort en même temps que son père ce fameux 20 décembre 1891 que nous commémorons chaque année.
M’siri fut assassiné pour le Katanga, contrée riche et prisée par les Européens. Ce n’est qu’à sa mort que les Belges purent s’implanter pleinement sur tout le territoire Katangais. L’on ne saura jamais ce qui serait advenu du Katanga si M’siri avait survécu et maintenu son pouvoir. Mais une chose est certaine, avec sa mort, les Belges avaient dorénavant mainmise sur l’un des territoires les plus riches d’Afrique.
M’siri a été tué, mais sa mémoire perdure. Ses oeuvres et ses contributions à l’édification du Katanga restent spectaculaires et nous interpellent encore.
Au fil du temps, l’histoire glorieuse de M’siri a été étriquée par ceux qui emboitent le pas des colonisateurs, et qui diabolisent ce grand homme de l’histoire africaine. Cependant, chaque année les anciens Bayeke relatent leur histoire et leur version des faits aux jeunes Bayeke et aux invités qui se joignent à cette commémoration solennelle.
Mushidi afwile Kadata
Nolo afwe ni muhanga !
Mushidi afwile Kadata
Nolo afwe ni muhanga !
Nolo afwe, ni muhanga !
Nolo afwe, ni muhanga !
M’siri est mort pour le Katanga
Bien que décédé, il est vivant !
M’siri est mort pour le Katanga
Bien que décédé, il est vivant !
Bien que décédé, il est vivant !
Bien que décédé, il est vivant !