Mwami Christian Munongo Msiri Mwemera
Le Mwami Mwemera naquit à l’aube le 19 Octobre 1955 à Lubumbashi la Capitale du Katanga. Il fut baptisé du nom Christian Munongo. Etant le premier né de Godefroid et Clotilde Munongo, sa naissance fut un moment de grande liesse pour toute la famille. Le 11 Juillet 1960, le Katanga déclara sa sécession de la République du Congo. Les Nations Unies (ONU), sous pression des pouvoirs occidentaux, craignit la perte des richesses minérales qu’abrite le Katanga. Une guerre acharnée s’ensuivit entre les casques bleus et les Forces katangaises. Inquiet pour la sécurité de ses enfants, Godefroid Munongo fut obligé d’envoyer Christian et son jeune frère Symphorien à l’étranger. Pendant les vingt prochaines années, Christian vécut en France où il poursuivit ses études jusqu’à sa licence en Relations Internationales.
Malgré les nombreuses années passées loin de sa patrie, « Msiri », comme son père aimait l’appeler, resta proche de ses racines Yeke. A l’âge de vingt-sept ans, Christian Munongo revint au pays, à la grande joie de tout le monde. Il prit en main la gestion de la société familiale agro-alimentaire LUFIRA qui regroupait des plantations de maïs, le transport, et des divers projets de développement.
Au milieu des années quatre-vingt, Christian se présenta aux élections parlementaires. Il mena une campagne digne qui le fit parcourir toute la collectivité et les recoins ruraux, dont la beauté il ne cessait de relater. Il aimait beaucoup le Katanga, ses peuples et sa diversité culturelle. Christian Munongo ne fut pas élu au parlement, mais il n’en perdit guère l’amour pour le peuple.
En 1990, la scène politique congolaise changeait de forme. Mobutu, sous pression des occidentaux, mit fin au système de parti unique, et autorisa la liberté de la presse. Cette volte-face, bien que prévisible après la chute du mur de Berlin, initia la conférence Nationale Souveraine (CNS). Le père de Christian, Godefroid, y participait et représentait les Chefs traditionnels et le Katanga, alors que Christian était membre de la commission constitutionnelle. Après une longue année de travail aux cotés de son père, Christian Munongo apprit de grandes leçons de politique et surtout les tensions que celle-ci peut engendrer dans une société comme celle du Congo.
Ne se doutant guère de ce qui allait advenir, Christian Munongo s’attela à mettre en pratique ses connaissances politiques dans la rédaction constitutionnelle. Il fut ainsi pendant cette décade entière l’un des conseillers de facto de son père le Mwami Shyombeka Godefroid Munongo.
Le 28 Mai 1992, Godefroid Munongo fit une crise cardiaque dont il mourra peu de temps après à l’hôpital Ngaliema à Kinshasa. Le destin de Christian Munongo changea en un instant. Après la période de deuil, le conseil des sages, qui souvent est restreint, décida d’inclure tous les notables, princes et membres de la famille de Msiri, dans le processus de sélection. Dans tout Bunkeya et les Mayanga (villages Yeke éloignés de Bunkeya, la population avait choisi Christian Munongo. Mais certains princes, craignant que la popularité de leur frère Christian allait influencer les sages, forcèrent une forme de démocratie directe, qui eut lieu devant tous les Bayeke et les observateurs officiels venus de Lubumbashi et de la collectivité.
En cette journée insolite et historique les nombreux princes, notables et membres de famille de sexe male, se rangèrent en file indienne et votèrent pour leur « candidat » favori, sous le regard patient et vigilent des villageois. Après de longues heures de vote, les bulletins furent dépouillés devant tout le monde dans les bureaux administratifs situés à la place publique, les Milumba. Vers le coucher du soleil, le décompte était achevé et le prince Christian Munongo reçut la grande majorité du scrutin. Aussitôt que les villageois apprirent la nouvelle, ils laissèrent entendre leurs cris de joie, longtemps frustrés.
Peu de mois après, le Mwami Christian Munongo fut intronisé à Bunkeya. Comme nom de règne, il déclara, « Ng’one Mwemera Milimo », qui veut dire, « Je suis le continuateur du travail ». Le Mwami Mwemera, en toute humilité, rendait hommage à ses prédécesseurs, dont les œuvres il admirait grandement.
Immédiatement après son intronisation, il entreprit la tâche de relancer le développement socio-économique du Bwami et celle de sauvegarder notre culture ; des œuvres nobles entamées par ses prédécesseurs. Dans ce même élan, le Mwami Mwemera créa la Fondation Mwami Msiri qui, à ce jour, continue de personnifier ses idéaux.
Victime du paludisme et hospitalisé à maintes reprises dans sa vie adulte, le Mwami n’échappa guère à ce fléau africain. Au mois d’octobre 1997, le Mwami tomba sévèrement malade et mourut d’une défaillance rénale à l’âge de 42 ans. Il nous a laissé un fils courageux, Henri Kimba Munongo. Le Mwami Mwemera Christian ne régna sur le trône de Msiri que pendant cinq années. Tous ses rêves pour un Katanga prospère, autonome et autosuffisant furent interrompus. Toutefois son optimisme et son amour pour la terre de nos aïeuls demeurent.
Post-scriptum :
Jamais je ne me remettrai de la mort de mes deux frères Christian et Symphorien Munongo. Pendant mes 34 années de vie, j’ai perdu beaucoup des miens qui avaient des futurs prometteurs devant eux. Leurs noms, leurs capacités intellectuelles, leur sens de l’humour, leur charme, leur courage ne quitteront jamais ma mémoire, tant que je serai en vie. Je pense ici à Christian, Symphorien, Bernard Mwenda Munongo, Marcel, Isaac (que je n’ai pas connu), Marguerite, Michel Mushinkula, Albertine Mutari, Micheline (Michou), Aubain, Lepate, et tant d’autres.
Devant une telle perte de vie, d’hommes, de femmes, tous jeunes en âge et chacun d’entre eux, ayant droit à une longue vie, je me demande Pourquoi…Quel ange de la mort, aussi puissant soit-il, trouve refuge dans cette maison royale…Pourquoi…
Comment est-ce que la terre peut-elle nous dérober de ceux-là, ceux qui nous donnaient la joie de vivre, ceux qui nous rappelaient que la terre valait la peine d’être foulée…et que avec eux, à travers mes yeux d’enfants, rien n’était insurmontable…
Main nul besoin de désespérer, car Dieu le créateur nous a épargné du désastre et nous en a laissé tant d’autres ; des hommes, des femmes, et même des enfants, qui peut-être un jour n’auront plus à demander…Pourquoi.
Dieu nous a donné le Mwami Mwenda Bantu Kaneranera, sur qui tous nos espoirs, espérances, courages et orgueils reposent.
Christian Munongo est mort, mais tout ce qu’il incarnait demeure pour toujours.